Au début des années 80, qui aurait pu imaginer le fabuleux développement du vin en boîte et son succès 30 ans après ? Encore inexistant au début des années 2000, le format Bag in Box a poursuivi jusqu’à aujourd’hui une croissance ininterrompue, les consommateurs s’étant laissés convaincre par ce « drôle » de contenant : pratique, économique, incassable, écologique et toujours plus qualitatif.
Nom générique du Bag in Box souvent nommé (à tort) Cubi pour Cubitainer, la caisse-outre est un contenant de taille variable fait d’une caisse en carton ondulé et d’une poche étanche souple, utilisé pour le transport et le stockage des produits liquides. Elle sera utilisée pour la 1ère fois pour du vin en Australie dans les années 60, et c’est en 1973 qu’une société d’emballage française lance un produit sous le nom de Bag-in-Box (aujourd’hui propriété de Smurfit-Kappa). Le Bag in Box ou BiB deviendra très vite le nom usuel du vin en boîte et connaît depuis le début des années 2000 une croissance ininterrompue.
Presque inexistant il y a 15 ans, comptant pour 21 % des volumes de vin vendus en France en 2007 et 27 % en 2010, le Bag in Box (qui existe en 3 formats : 3, 5 et 10 litres) totalise près de 366 millions de litres en 2015, soit 38 % des volumes, et sa progression ne va pas s’arrêter là. Déjà très présent dans la grande distribution avec près de 40 % des ventes et un milliard d’euros de chiffre d’affaires, le BiB devrait représenter 50 % des volumes de ventes dans ce circuit d’ici 2020 selon Euromonitor. Un développement dans lequel le succès des rosés a son importance, avec des ventes dans ce conditionnement multipliées par 3 entre 2007 et 2015, mais qui concerne aujourd’hui tous les types de vins. Et même si la part des AOP dans les vins en BiB s’est quelque peu réduite sur cette même période passant de 29 à 24 % au profit des vins sans IG, le Bag in Box est aujourd’hui dans toutes les grandes appellations françaises, tant avec des marques de renom que des noms de châteaux.
Une tendance de fond en France mais aussi dans d’autres pays consommateurs comme les pays d’Europe de Nord où la consommation de vin en BiB représente presque la moitié des vins achetés, ou encore la Belgique, les USA ou le Royaume-Uni.
Et le BiB continue d’investir les rayons vins, se dévoile dans les restaurants ou se montre dans les cuisines de consommateurs de plus en plus convaincus par les avantages du vin en boîte.
Lorsque Jean-Paul et Sophie Lafage, créateurs de la première gamme de grands vins en BiB la « Collection Verre après Verre », se lancent à la fin des années 90, ils sont presque les seuls à y croire. C’est Jean-Paul qui arrivera à l’époque à convaincre l’interprofession bordelaise d’autoriser le BiB pour les AOC de Bordeaux, et l’Alsace encore aujourd’hui le refuse! En 2016, certains le voient comme l’un des grands vecteurs de développement du marché du vin ; Franck Crouzet, directeur de la communication du Groupe Castel, n’hésite pas à parler de « locomotive la plus dynamique du marché national (français) ».
Un succès très certainement dû aux qualités spécifiques de ce contenant que lui reconnaissent désormais les consommateurs et les professionnels, restaurateurs, sommeliers ou cavistes : le BiB est pratique (poignée, robinet doseur, excellente conservation après ouverture), incassable, esthétique (photos, étiquettes, graphisme des lignes de produits) et écologique avec un bilan carbone 6 fois moins élevé pour un BiB de 3 litres que pour une bouteille 0,75 cl et 8 fois moins pour un BiB de 5 litres. Des spécificités auxquelles se sont attachés tous les grands opérateurs et spécialistes du Bag in Box pour faire de ce contenant un petit concentré de prouesses technologiques, que ce soit pour les différents éléments du contenant (poche et robinet) que pour la mise en BiB très suivie, ou la fabrication du carton au design étudié.
Castel a par exemple équipé en 2014 son site de Saint-Priest en Vallée du Rhône, puis Béziers en Languedoc fin 2015, de nouvelles lignes de conditionnement. Jean-Paul Lafage a créé le premier camion équipé d’une unité entièrement automatisée de mise en BiB pour sa Collection Verre après Verre tandis que BiBoViNo, un réseau de cavistes créé en 2013 autour d’une gamme de « beaux bibs pour des vins de vignerons d’exception », confie ses vins à un embouteilleur spécialisé en Bourgogne afin de contrôler l’ensemble du process.
Mais au-delà de l’emballage, c’est la montée en gamme des vins proposés en Bag in Box à des prix particulièrement compétitifs qui explique aujourd’hui un tel engouement. BiBoViNo comptera 35 boutiques en France et à l’étranger fin 2016, et offre 40 à 50 références rigoureusement sélectionnées dans toutes les appellations françaises dans les 3 couleurs. Frantz Roesch, l’un de ses fondateurs et président, cite en exemple le Moulin à Vent 2014 de Jean-Paul Brun ou la Hautes-Côtes de Nuits 2015 d’Emmanuel Giboulot dans son assortiment de fin d’année. Si son entrée de gamme est autour de 20-22 € le BiB de 3 litres, il propose un Crozes-Hermitage à 42 € (PV détail) et note que ce sont les vins haut de gamme qui se vendent le mieux.
Castel décline toutes ses marques phares et ses dernières nouveautés en Bag in Box en différents couleurs et niveaux de gamme, jusqu’aux Châteaux Castel qui ont vu leurs ventes en BiB augmenter de 25 % en 2015. L’enseigne de grande distribution U communique sur ses Bag in Box ‘Club des Vins & Terroirs’ « un label de passion et de plaisir pour des BiB de vins de qualité premium ».
Autre intérêt économique du Bag in Box, il est porteur de développement de chiffre d’affaires en RHF avec la croissance du service de vin au verre. Pour Franck Roesch, « il résout à zéro coût le problème de la perte sur une carte de vins au verre », et pour Jean-Paul Lafage, « il suffit de 20 BiB pour pouvoir proposer 20 vins différents à ses clients, sans souci de conservation et avec un excellent coefficient multiplicateur », et pourtant seuls 40 % des restaurateurs français utilisent le Bag in Box pour ce type de service.
Si les atouts pratiques et qualitatifs du Bag in Box expliquent son succès, ils vont aussi dans le sens des nouvelles tendances de consommation : un achat simple et décomplexé, hors des codes traditionnels ; une consommation au verre individuelle ou en groupe, chez soi ou à l’extérieur, et possible dans le temps (6 à 8 semaines) ; un gain de place et un geste écologique. Sans oublier la facilité des accords à table qu’il permet de réaliser puisque l’on peut disposer d’une cave à tout moment.
Et pourtant seulement 23,7 % des Français ont acheté du vin en BiB en 2015 (vs 86,5 % de pénétration pour le vin en général), et certains consommateurs continuent à le confondre avec le cubi qui n’a aucune de ses qualités techniques et de conservation. Que dire aussi des producteurs encore réticents à mettre leurs vins en BiB, sans parler de certaines interprofessions françaises ou de pays viticoles ?
Nadine Franjus-Adenis, œnologue et créatrice du Blog du Bib (blog-du-bib.fr), n’hésite pas à dire que « pour connaître la qualité des vins d’un viticulteur, il faut goûter son entrée de gamme. Le BiB en est souvent un bon exemple : si le vin en BiB est de qualité, toute la gamme est bonne ».
Communication sur l’image du contenant Bag in Box, optimisation de l’exposition du BiB en GMS, multiplication des occasions de découvrir les vins en boîte pour les consommateurs comme pour les professionnels, et développement des ventes à l’export sont quelques-uns des axes de réflexion sur lesquels travaillent les opérateurs du secteur pour confirmer ces belles performances et encore mieux séduire les amateurs de (bons) vins.
En 2016, Vitisphère a lancé un concept unique de dégustation autour des BiB, l’Open Wine Box-Tour, avec la mise en place d’espaces consacrés à ces contenants lors des grands salons professionnels comme Vinisud ou le Salon des Vins de Loire. « Plus de 100 exposants & producteurs ont répondu favorablement... Un vrai succès ! Ces nouveaux espaces de dégustation libre ont trouvé leur place, leur originalité mais aussi la légitimité concernant ce type de produits et ont été des nouveautés remarquées sur ces salons, notamment pour les acheteurs ! », s’enthousiasme Laurent Causin, chef de marché chez Vitisphère. Une initiative qui va se poursuivre en 2017 sur d’autres grands salons internationaux.
• Ventes de Bag in Box en GMS (France) : 366 millions de litres (+ 2,9 %)*
• Répartition des ventes de vin en Bag in Box en hypers et supers* :
Par catégorie :
- IGP cépage : 35,5 %
- AOP : 24 %
- IGP standard : 18,6 %
- Vins sans IG : 14,3 %
- Vins hors France : 18,6 %
Par couleur :
- Rouge/red : 48,4 %
- Rosé : 40,9 %
- Blanc : 10,7 %
* Sur un an, d’avril 2015 à avril 2016
*Bag-in-Box : une marque déposée par Smurfit Kappa
Sources : CIVB / IRI – Euromonitor – Kantar – Vitisphère – Rayons Boissons – Smurfit Kappa