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Jean-Luc Thunevin

12/13
Portrait de vignerons

Portrait de vignerons Saint-Émilion



Jean-Luc Thunevin

De la chance,
de l’opiniâtreté,
de la volonté…
et le concept
“Vin de garage”
était né.



Quel était le destin de ce jeune garçon de 9 ans, fils de pied-noir, tout juste arrivé en France en 1960? Nul ne savait. Pourtant, il inventa un concept marketing à faire pâlir d’envie de nombreux vignerons.



Jean-Luc et Murielle Thunevin.

Rien ne le prédestinait au monde du vin. Ni sa formation dans une école forestière, ni ses premières années professionnelles dans le secteur commercial bancaire, alors que Jean-Luc Thunevin redoutait l’approche directe au client. Sa timidité, son sens de l’observation et son pragmatisme lui permettaient d’envisager l’avenir avec opiniâtreté, mais non sans souci financier. Il voulait être «chef», et devenir entre­preneur.

Le virage s’amorce en 1983, avec une boutique à Saint-Émilion, puis une activité de négoce, puis d’autres boutiques comme la cave L’Essentiel,rue Guadet. Il aime à s’amuser, à faire rire, mais tout en restant sérieux en affaires. «Il faut une espèce de fureur pour être créatif et montrer à ses pairs que l’on fait partie de la famille», explique-t-il.

Il est né un vendredi 13, date prémonitoire pour surfer sur la vague de la chance, même s’il fallut aider le destin. Avec Murielle, sa complice, son binôme, sa compagne, l’idée leur vient de faire leur propre vin. De quelques arpents à Saint-Émilion, ils élaborent un vin de main de maître au sens pur du terme: dans leur maison, leur garage, chez eux, avec leurs bras et leurs tripes… désormais les journalistes internationaux se focalisent sur eux, les commentaires fusent, jusqu’à les encenser pour la qualité du vin.



«J’ai l’esprit de contradiction, de l’imagination, à défaut d’avoir des moyens et surtout ni Murielle ni moi n’étions formatés à un goût, à un vin car novices en la matière. Nous avions en revanche un grand souvenir émotionnel avec un Pétrus 55. Nous avons simplement appliqué aux 1,20 ha les méthodes des grands châteaux et cherché un vin qui nous plaise.J’avoue que nous étions au bon endroit et c’était le bon moment de le faire», explique-t-il avec un léger rictus, son œil perçant et son tutoiement qui incite à faire de même. Et d’ajouter: «Notre vin était et est encore différent. La différence, obligatoirement, fait polémique». Le concept de vin de garage était né, et Jean-Luc reconnaît garder une certaine fierté d’avoir bousculé les codes.



Ets Thunevin

BP 88 - 6 rue Guadet
33330 Saint-Émilion
Tél. : +33 (0) 5 57 55 09 13

www.thunevin.com


Jean-Luc Thunevin.


Depuis, Virginie de Valandraud est née, deux propriétés en Pomerol et Lalande de Pomerol ont rejoint l’entreprise, Clos du Beau-Père et Domaine des Sabines, sans compter la cuvée Bad Boy - sur­nom que Robert Parker avait attribué à Jean-Luc - déclinée en appellation Bordeaux en rouge, en Vin de France blanc pour le Chardonnay, et qui de­vient Bad Girl en Crémant.

Soyez curieux, allez sur Internet, vous retrouverez le clip de Bad Boy sur une vidéo réalisée par des fans coréens, sans oublier Valandraud dans les livres japonais Les Gouttes de Dieu. Jean-Luc Thunevin ne saurait être sans Murielle: deux artisans créateurs et maintenant consultants, qui ont, grâce à leur volonté et un peu de chance, hissé leur vin Valan­drauddans les Premiers Crus Classés de Saint-Émilion en 2012, avec une sortie prix en Primeurs raisonnable. Partis de rien, sans héritage ni parrainage, voilà une belle consé­cration après les tumultes des débuts!

Florence Varaine
Photos Jean-Marc Koch