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Champagne : 12 chefs de cave emblématiques

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Champagne 12 chefs de cave emblématiques




Le chef de cave est l’esprit d’une Maison.
Il pratique l’Art de l’assemblage,
élabore les vins, et la Cuvée Brut
en particulier, dans le respect du style
de chacune et la fait subrepticement
évoluer pour la mettre au goût du jour.
La vinification est loin d’être sa seule fonction;
à lire ci-après les profils variés
des 12 professionnels rencontrés.




MAISON CHARLES HEIDSIECK
Thierry Roset crée des cuvées de haute précision

Né à Sézanne dans une famille d’épicuriens amateurs de grande cuisine et de bons vins, Thierry est naturellement devenu gourmand.

À l’adolescence, il développe des qualités scientifiques, dont la curiosité et la précision, et choisit la faculté d’œnologie de Reims pour étudier les vins. Après un stage d’un an chez Louis Roederer, une vendange chez Moët & Chandon, un remplacement à la production chez Charles Heidsieck, et quelques années en poste à la Station Œnologique d’Epernay, il est appelé en 1988 par Daniel Thibaut à le rejoindre. Le 2 septembre 2013, Thierry fête ses 25 ans de Maison, il est à son tour devenu le chef de cave de Charles Heidsieck. Et sort cette année ses premiers assemblages de Brut Réserve et Rosé Réserve, des Champagnes de haute précision.
«Quand tout change, il ne faut pas de rupture», pense Thierry Roset. Succédant à Régis Camus, une icône toujours aux commandes de Piper-Heidsieck, il est promu chef de caves de Charles Heidsieck et a accepté de nous rencontrer. À l’image du fondateur, un dandy convaincu de la qualité de ses cuvées, ce gentleman évoque «la magie des Champagnes, ces êtres vivants aux personnalités affirmées»: Ambonnay avec sa puissance, sa finesse et sa générosité; Oger et sa texture soyeuse; Verneuil et sa gourmandise... et crée dans notre imaginaire une furieuse envie de les déguster. Les réunir, lors de l’élaboration, l’émerveille chaque année.
S’appuyant sur plusieurs générations de chefs de cave, la Maison a su développer un style de vins reconnaissable entre tous: généreux, chaleureux, complexe et profond. L’assemblage du Brut Réserve, composé d’un tiers de Chardonnay, un tiers de Pinot Noir et un tiers de Meunier, avec ajout de 40 % de vins de réserve, s’est révélé constant au travers des âges. Thierry apporte à cette continuité un surplus de précision dans sa construction. Il a resserré le nombre de crus de 120 à 60 (retenus pour leur franc caractère ou leur assurance de longue garde) dans ses premiers assemblages, qui voient le jour après trois ans de long sommeil en cave.
Il a obtenu que tous les vins de réserve conservés en cuve inox et maturés sur lies fines de plus de dix ans soient réservés au Champagne Charles Heidsieck afin que leur âge moyen passe de 8 à 10 ans. Ses vins exhalent ainsi plus de bouquet, de linéarité, de minéralité et de complexité.
À son arrivée, Cécile Bonnefond, présidente des Maisons Piper-Heidsieck et Charles Heidsieck (propriété du Group familial EPI de Christopher Descours depuis 2011), a demandé à l’ensemble des collaborateurs de la Maison Charles Heidsieck de rechercher l’ADN de la marque. Charles-Camille Heidsieck, cet entrepreneur de génie qui n’achètera pas de vigne mais investira dans de somptueuses crayères gallo-romaines pour caves, l’incarnait.
Le nouveau Brut Réserve sera alors conditionné dans une bouteille exclusive nommée “Crayère”. Son design rappelle l’archi­tecture de la crayère n°9, ultime caveau d’une im­pres­sionnante succession de cathédrales souterraines de toute beauté où sont enfouis des trésors de vins - dont le Brut Réserve - pour une maturation prolongée «de trois ans révolus et non négociables», indique Thierry.


Thierry Roset

Toujours dans un souci de précision, cet œnologue en chef imprime, sur la contre-étiquette, les années de mise en crayère et de dégorgement pour renseigner l’amateur. «J’accompagne désormais les vins en Chine comme aux États-Unis, en Australie, en Europe, en Italie et au Royaume-Uni. Avec toutes ces mentions, lors de dégustations internationales, les Champagnes Charles Heidsieck, à forte personnalité, s’expliquent “à livre ouvert”».
Si la précision ne fait pas directement le bonheur du consommateur, elle y contribue certainement, en mettant en exergue le caractère original de la dive bouteille! « Le plaisir, selon Jean Anouilh, n’est-il pas la seule chose qui oblige les hommes à un peu de précision? »

Marie-Caroline Bourrellis

charlesheidsieck.com

MAISON DEUTZ
Michel Davesne donne de l’importance aux détails
pour une belle production

Né à Sézanne dans une famille d’agriculteurs, Michel Davesne présente un parcours atypique.

Après un bac scientifique, des classes préparatoires au Lycée Clémenceau à Reims, des études à l’Université de Compiègne, il devient ingénieur en bio­tech­no­logie, et enchaîne les stages, chez Goyard puis au CIVC. En 1985, le Champagne Palmer cherchait un chef de cave, il le retient. Dans cette coopérative, il apprend le métier sur le tas, réussit son diplôme d’œnologie, bref, passe dans ces murs une tranche de vie de dix-huit ans. En 2003, à 45 ans,
il rejoint le Champagne Deutz, une Maison à taille humaine dont il apprécie sincèrement les vins. Aujourd’hui c’est lui, Michel Davesne qui les fait, c’est son métier!
Il orchestre toute la production, de l’arrivée des raisins au dégorgement de la bouteille. De nature humble, il s’investit corps et âme pour servir la Maison et perpétuer le style des vins en essayant de l’améliorer. «C’est une recherche de chaque jour. J’ai un côté “obsessionnel de la qualité”. Elle s’obtient par une addition de gestes quotidiens qui ont tous leur importance. Je suis au milieu des hommes et leur dit ce qui va ou ne va pas. Je suis favorable à l’amélioration du fonctionnement de la production.
En 2004, la Maison Deutz a modernisé et complété l’outil. En acquérant une nouvelle chaîne de dégorgement, la cadence de production s’est élevée à 3.000 bouteilles/heure; et avec l’uti­lisation du jetting* intégré, nos vins ont gagné en régularité. En construisant une nouvelle cuverie dans un bâtiment vide et en introduisant des cuves de 100 à 125 hl, j’ai pu vinifier cru par cru, et même parcelle par parcelle, sur les vins du Domaine Deutz (42 hectares). En 2011, la capacité de la cuverie - succès oblige (plus de deux millions de cols vendus en 2013, un record) - est passée de 17.000 à 30.000 hectolitres, avec introduction de cuves en inox allant de 25 à 300 hl.
J’aime les Maisons qui bougent, qui évoluent. J’ai mis mon sens du détail au service de la qualité. Ainsi, j’ai modifié les techni­ques de soutirage pour réduire le contact des vins avec l’oxygène et minimiser le risque d’oxydation. La nouvelle cuverie a permis d’abaisser le nombre de pompages et de donner un surplus de pureté et de précision aux Champagnes. L’élaboration est inchan­gée par rapport à celle de mes prédécesseurs. Le style Deutz s’affirme dans l’équilibre des trois cépages pour composer le Brut Classic, des vins droits, fins, élégants et précis auxquels on ne touche pas avant mars et que je tire en mai.



Michel Davesne au service du Champagne, dans les salons de la Maison Deutz.

Tous les ans au moment de l’assemblage, je remplis une page blanche. Les approvisionnements ont augmenté mais nous sommes restés dans les mêmes crus. Le président Fabrice Rosset m’a donné l’opportunité de créer le Brut rosé non millésimé qui plaît, puisque cette cuvée est toujours en rupture en fin d’année. Composé majoritairement avec du Ay et quelques grands crus de la Montagne de Reims, ce rosé est presque un Blanc de Noirs, il ne contient que 20 % de Chardonnay et n’est ni lourd, ni trop vineux.

Si c’était à refaire, pas d’hésitation je signerais à nouveau chez Deutz, une Maison attachante, avec une direction proche du président, où les décisions sont prises rapidement, où le fonc­tionnement est simple, où les relations sont directes, tant avec les vignerons qu’avec les hommes de la Maison. Le côté familial est unique, sympathique, il donne envie de se surpasser».

Le mot de la fin à Leonard de Vinci, qui écrivaitque «les détails font la perfection et la perfection n’est pas un détail»!

* technique utilisée pour éviter l’oxydation des vins de Champagne
au cours du dégorgement.

Marie-Caroline Bourrellis www.champagne-deutz.com

MAISON DUVAL-LEROY
Sandrine Logette poursuit une démarche d’amélioration continue

Rémoise de naissance, fille de Champenois, œnologue diplômée de l’université de Reims, matheuse et scientifique, Sandrine Logette a un parcours dynamique. Formatée dans sa jeunesse aux confitures et autres douceurs concoctées par sa grand-mère paternelle, et aux bons vins du côté maternel, elle avoue être très gourmande et affectionner le sucre.

Carol Duval, présidente de la Maison éponyme, l’engage en 1991 «en tant que responsable qualité,pour créer le service, au siège à Vertus. Jamais, avoue cette jeune femme pudique et discrète, je n’aurai imaginé être un jour chef de cave». En 2005, elle lui confie la fonction et en 2007 la conforte officiellement dans le poste de chef de cave de la Maison Duval-Leroy. Depuis, Sandrine poursuit une démarche d’amélioration continue!
«Dès mon arrivée, en 1991, dans la Maison familiale Duval-Leroy qui a vu six générations se succéder, ma première tâche fut de mettre en place la démarche qualité. Cette Maison, très Chardonnay par son Domaine de 200 ha en exploitation, situé en Côte des Blancs, autour de Vertus, Sézanne et Vitry, complété par 400 ha d’approvisionnements via des livreurs, produit environ 5 millions de cols répartis sur une douzaine de cuvées.
Elle a des clients influents qui ont demandé à sa présidente de travailler sur la norme 9002 appliquée à la vinification. J’ai participé à sa mise en place. Je lui ai apporté la technique. On a construit ensemble l’organisation et la traçabilité de la production Duval-Leroy. Ont été établies des règles de gestion qui visent à élaborer bien et juste, elles régissent encore mon quotidien!
À l’origine et au cœur de ce nouveau système, j’ai amélioré la traçabilité et la qualité sur les lignes de tirage et de dégorgement. Et depuis quinze ans, au vu des résultats, j’ai gagné la confiance de la présidente. Ce qui a été construit a demandé du temps, la structure est importante et j’ai grandi avec la Maison. Le fait d’en avoir une bonne connaissance me donne les clés de son fonctionnement optimal.
J’ai la volonté d’améliorer les choses. J’ai innové en passant sous bois les Chardonnay, dans un premier temps en pièce bourguignonne de 3-4 vins. En 2006, je leur ai préféré des barriques neuves. Celles-ci ont fait l’objet de trois ans de recherche car je ne voulais pas donner un goût de toasté excessif au vin. Pour augmenter la trame, la richesse et la charpente de ces Chardonnay, j’ai utilisé des fûts à chauffe légère et profonde, qui ont rendu ces vins généreux et voluptueux.
J’ai tiré en juillet 2013
Femme de Champagne 2012,une vendange magnifique qui passera en bouteilles sur lattes dix ans avant de voir le jour. J’obtiens aussi de bons résultats avec des vinifications parcellaires en petite cuve inox complétée d’une partie de cuvée vinifiée sous bois. Sont ainsi traités la cuvée Femmede Champagne, le Clos des Bouveries 2005 et le Blanc de Blancs 2002, un de mes préférés avec son côté séducteur, élégant, riche et généreux, et sans sucre, idéal pour ma ligne.
En 2008 a été construit le chai et ses barriques, selon ma conception; et dans la cuverie ont été introduites des petites cuves, que j’avais préconisées pour effectuer une vinification parcellaire. Chez Duval-Leroy, du fait de notre haut niveau d’hygiène, de la sanitation de notre ligne de tirage, on pourra assembler les cuvées avec et sans fermentation malolactique.



Sandrine Logette, chef de cave de Duval-Leroy, qui a élaboré avec sa présidente Carol Duval le tout nouveau Femme de Champagne Rosé.

Je progresse touche par touche, très lentement, pour faire évoluer le goût du consommateur, sortir le champagne de sa seule consommation à l’apéritif et le promouvoir en gastronomie, le temps d’un repas dans une belle table française. D’un dîner au champagne, on sort plus léger. Pour y arriver, il faut que l’incisivité du vin soit intégrée dans l’onctuosité du vieillissement et non du sucre. Je préconise des dosages faibles parce que je travaille mes vins en amont. Chaque cuvée a un dosage correspondant à une finale nette. Le Brut 1er Cru n’était pas conçu comme un champagne de repas, je l’ai retravaillé en lui ajoutant de la consensualité, en sélectionnant des Pinots Noirs en Grand et Premier cru pour une approche toute en légèreté, une justesse de vinosité, une finale de fruits rouges de grande élégance, compréhensible par tout le monde ».
Très créative, la Maison Duval-Leroy! Femme de Champagne Rosé de Saignée a vu le jour cet automne et un nouveau Millésimé Blanc de Blancs 2006 sortira début 2014. Les projets pullulent et nombreux sont ceux qui sont initiés par Sandrine Logette, une femme d’intuition et de détermination!

Marie-Caroline Bourrellis www.duval-leroy.com

MAISON POMMERY
Thierry Gasco multiplie les créations qui deviennent des collections

Tel père, tel fils. Bernard Gasco, chef de cave chez Lanson, initia son fils Thierry à l’œnologie dès l’âge de 8 ans. Celui-ci se passionna pour la vinification, et vécut l’apparition, dans les années 60, des premières cuves inox, du bouchage capsule, du remuage automatique…

Pendant les vacances scolaires, il aidait aux prélèvements, suivait les résultats d’analyses. Pour consolider cette formation de terrain, il entreprit des études d’œnologie à Dijon et revint faire son stage de fin d’étude en Champagne. Mais ne trouvant pas de travail en pleine crise du pétrole, il entra comme manutentionnaire chez Goulet Turpin en 1975, fut nommé chef de cave trois ans plus tard, et passa dix ans dans le monde du vin. En 1986, il entre chez de Venoge, et fait évoluer la marque et l’outil de production. En 1992, il est appelé par la Maison Pommery. Aujourd’hui il est devenu l’œnologue du groupeVranken-Pommery!
Dès son arrivée, la Maison Pommery l’a fasciné par l’élégance, la finesse et le style de ses vins à dominante Chardonnay; par l’étendue de sa production (6 millions de cols); par le gigantisme de ses installations qui contrastait avec l’étroitesse de sa gamme. N’existaient alors que 4 cuvées !
Il connut plusieurs présidents. Jean-Marie Lefèvre fit bouger la Maison. La marque fut mise en couleur. À sa demande, Thierry Gasco élabora de nouveaux produits de saison : Blanc de Blancs Summertime et Blanc de Noirs Wintertime. En 1999, un nouveau défi se présenta, avec le lancement du quart Pop, destiné aux jeunes qui aiment le vin frais et non oxydatif. Il réussit à le transvaser sans contact avec l’oxygène en le conservant à l’abri du gaz carbonique grâce à une nouvelle machine de marque Perrier.
En 2002, Paul-François Vranken, le nouveau propriétaire, lui donne carte blanche sur les vins et lui assure l’autonomie dans son activité. Il lui demande d’élargir la gamme saison­nière: Thierry crée Springtime, un rosé très frais et pétillant, et Falltime, un Blanc de Blancs extradry. Pop devient aussi une ligne avec l’avènement d’un rosé Pink Pop, un millésime Gold Pop et enfin Silver Pop.
Nathalie Vranken, surfant sur la tendance écologique, souhaite l’élaboration d’un champagne éthique, qui soit le porte-drapeau du travail de la Maison en termes de démar­che environnementale. Thierry crée Earth Pop, produit de la lutte raisonnée, avec bouteille allégée et étiquette en papier recyclé, commercialisé sans emballage… un véritable succès.
En 2009, Apanage Rosé est lancé et présenté dans une bouteille spéciale. Fin 2011 est commercialisé Les Clos Pompadour, le vin du plus grand clos de la Champagne, élaboré à partir de la vendange 2002, présenté exclusivement en magnum, et assemblé avec 75 % de Chardonnay, 20 % de Pinot Noir et 5 % de Pinot Meunier. Enfin, sa dernière nouveauté 2013 c’est Apanage Prestige, présenté en bouteille spéciale, assemblé avec 3 millésimes 2004-5-6, exclusivement Grand Cru. Quelle effervescence dans la création!


Thierry Gasco dans les caves de la Maison, vérifiant le dépôt dans le col de la bouteille.

«J’ai pu m’exprimer à travers l’élaboration de nombreuses cuvées. Cha­cune fut vécue comme la naissance d’un bébé, avec fierté. Le millésime 2002 est l’année de référence qui m’a le plus marqué. Dans la dernière décennie, 2002 et 2004 me semblent les plus intéressantes. J’ai toujours cherché à mettre en valeur les cham­pagnes, et les vins Maison, en pensant aux alliances possibles avec des mets de grands Chefs. Mon président, Paul-François Vranken, m’a offert la possibilité de travailler l’œnologie sur l’ensemble du groupe, ce qui m’a donné une vision plus large du vin.
Depuis quatre ou cinq ans, j’étudie la façon de faire bouger l’élaboration du champagne au niveau technique, en préservant ses traits de caractère et sa complexité. La Champagne se doit d’évoluer comme d’autres régions dans le monde l’ont fait. Mon dada, c’est la vinification, je me suis impliqué dans l’inter­profession en siégeant à la Commission Technique du CIVC,
en assumant neuf ans durant la présidence des Œnologues de Champagne, puis pendant six ans celle des Œnologues de France. Durant ce mandat national, nous avons réussi à obtenir que le diplôme national d’œnologue s’étende à 5 ans d’étude et soit reconnu comme un Master par l’Europe».

Hyperactif, Thierry peut être fier de sa pierre apportée à la vinification du Champagne, mais aussi de sa lignée: sa fille, diplômée d’œnologie, marche déjà dans les pas de son père et de son grand-père…

Marie-Caroline Bourrellis




www.vrankenpommery.fr

MAISON G.H.MUMM
Didier Mariotti crée de l’émotion et aime la partager

Benjamin des chefs de cave des Grandes Maisons de Champagne, Didier Mariotti, ce quadragénaire né en Suisse, de père corse et de mère bourguignonne, a passé sa petite enfance entre Lausanne et Montreux, et en a gardé un sens de la ponctualité et un goût pour l’ordre.

Retour en France à l’âge de dix ans. À vingt ans, il intègre l’Institut Supérieur d’Agronomie de Nancy, effectue un stage de fin d’études chez Moët, fait la vendange et passe un an dans l’équipe œnologique de Dominique Foulon. Il part ensuite dix-huit mois en CSN*, en qualité d’attaché commercial au Poste d’Expansion Économique de New York. Puis revient dans l’Hexagone, présente son DNO** avec un nouveau stage chez Moët à la clé. En 1999, il est engagé comme responsable de cuverie et de vinification par Nicolas Feuillatte.
Il rejoint Mumm, en 2003, comme adjoint de Dominique Demarville, avant de devenir chef de cave en titre en 2006. Il a alors 35 ans! La Maison G.H. Mumm a su déceler son talent précoce. Il est désormais aux commandes des assemblages mais sa tâche ne se résume pas seulement à l’œnologie. Le management de la production, la communication à l’étranger et la prospective de la Maison en sont les trois autres composantes.
«Le cœur du métier de chef de cave concerne l’œnologie, elle représente 90 % du savoir. Mais ce que l’on n’apprend nulle part, c’est la dégustation. Il faut comprendre le style de chaque Maison. Il faut savoir apporter de la complexité au vin en lui gardant de l’élégance et de la retenue, particulièrement avec la signature du Pinot Noir, cépage dominant de la Maison G.H. Mumm. Il faut arriver à mettre en avant sa belle expression, sans apport de lourdeur. Ce n’est pas avec un supplément d’années en cave qu’on y parvient, c’est la subtilité de l’assemblage qui fait la différence. Il se fait dans la perspective d’obtenir un vin prédéfini, complexe, avec un palais de fruits secs, de pralin.
Le Champagne, c’est du vin, je me suis inspiré du Bourgogne. Savoir tenir un cheval au trot, sans qu’il parte au galop, on y parvient avec l’expérience. Je déguste environ deux mille échantillons par an avec mon équipe, je dois perpétuer le style G.H.Mumm, je suis l’héritier d’un savoir-faire. Brut Cordon Rouge représente 90 % des ventes et je l’ai fait évoluer, de façon imperceptible pour le consommateur, pour le rendre plus actuel mais aussi plus qualitatif. Son temps de vieillissement est passé de 15 à 36 mois. Les vins de réserve entrant dans sa composition sont plus anciens, et représentent désormais 30 % de la cuvée.
La Direction attend aussi que j’apporte ma sensibilité, ma touche personnelle au vin. J’ai beaucoup de fierté à élaborer le Cordon Rouge. Je l’ai fait avec amour et passion.
Les sentiments et le res­­senti sont pour moi très importants. Élaborer des vins, c’est comme se découvrir pour l’artiste, c’est une forme de mise à nu. L’assemblage, je le fais avec mes tripes, j’ai toujours beaucoup de doute: il implique une remise en question permanente et demande l’apport de solutions. Toutes les cuvées de la Maison, à l’exception des plus âgées René Lalou et Verzenay, je les ai élaborées. À l’origine de toute cuvée, il y a une histoire d’amour qui débute à la dégustation des vins clairs et qui se perpétue lors de la vinification, jusqu’à la révélation dans le verre du consommateur».

Didier Mariotti

Didier Mariotti communique à l’international sur les vins G.H.Mumm, au Japon comme au Royaume-Uni ou en Nouvelle Zélande où il se rendait le soir de notre interview. Il en parle avec émotion, reprend les mots du fondateur, et propose «seulement le meilleur». Il redore le blason de la marque en
expliquant sa priorité: «élaborer des vins de qualité, sans compromis dans le parti pris de l’excellence».
Il élabore aussi selon ses convictions personnelles et nous livre: «je n’aime pas les vins expressifs dès leur ouverture, je préfère les laisser se livrer au réchauffement». Comme il l’explique, il «éduque les marchés». Le choix d’un vin est lié à un instant, un état d’esprit, une météo. Sur une île déserte, il hésiterait à emporter le Blanc de Blancs Mumm de Cramant ou le Brut Sélection composé de 5 grands crus à dominante Pinot Noir, assemblé avec des vins de réserve et conservé cinq ans en cave.
Créateur d’émotions, Didier Mariotti l’est assurément, mais il est aussi manager de production. La tâche semble lourde - la Maison G.H.Mumm produit huit millions de cols - mais il est bien épaulé par une équipe performante d’une centaine de personnes, avec une dizaine d’adjoints répartis à la cave, à la production, à l’œnologie, aux travaux de développement industriel…
Enfin, dans son agenda, 25 % de son temps est consacré à la prospective! Ce sujet le passionne. Avec son équipe, il réfléchit à l’évolution de la production industrielle de la Maison, de sa capacité, de son organisation. Il se projette dans le futur pour initier les lancements à venir. Mais aussi pour définir les Champagnes de demain en tenant compte des tendances du marché, du réchauffement climatique, du mode de consommation…
Quels sont-ils? «Je ne peux vous les dévoiler, c’est un engagement de la Maison sur le futur!». L’entretien dans son bureau mitoyen de la cuverie se clôt, il a un avion à prendre le soir même, pour la Nouvelle-Zélande.

* Coopération Service National

** Diplôme National d'Œnologue

Marie-Caroline Bourrellis

www.ghmumm.com

MAISON GOSSET
Jean-Pierre Mareigner prend la mesure du temps

En rejoignant Gosset en septembre 1983, Jean-Pierre Mareigner a mis ses pas dans les traces de son père qui dirigea le vignoble de la plus ancienne Maison de Vins de Champagne pendant quinze ans, avant de fonder sa propre exploitation.

Né à Ay en 1956, Jean-Pierre fit ses classes au Lycée Viticole de Beaune, puis son service militaire à Metz dans la musique: il est joueur de saxophone. Au retour, après avoir œuvré deux ans en cuverie chez Lanson, il s’est investi dans l’enseignement auprès de fils de viticulteur en Maison familiale dans l’Aube, aux Riceys, puis à Gionges. Un jour, Paul Varnier, le chef de cave de la Maison Gosset, l’appela en lui disant qu’il partait en retraite et l’avait coopté pour être son successeur.
«La Maison Gosset a ses traditions, une vinification spécifique (elle ne fait pas la fermentation malolactique), un goût défini. Cette signature Gosset n’a pas changé depuis l’origine, j’en ai acquis les fondamentaux auprès de Paul.
Bien sûr, afin de répondre aux aspirations du consommateur, certaines cuvées sont aujourd’hui passées plus Chardonnay pour être dégustées à l’apéritif, mais il s’agit de nuances, la structure des vins a été conservée.
Cette transmission du savoir, des secrets de cave, est importante pour perpétuer un goût. En tant qu’homme du terroir, je me suis particulièrement investi dans les contacts avec les viticulteurs, livreurs depuis plusieurs générations, et ai entretenu des relations familiales pour suivre au plus près l’évolution de la vigne, et au final obtenir des grappes bien formées, avec des raisins de bonne maturité.
Au 14 juillet 2013, la fleur terminée, on compte 90 à 110 jours pour connaître les dates de vendange. Elles ont débuté, en Grande Vallée de la Marne et en Côte des Blancs, deux ou trois jours avant celles de la Montagne de Reims pour des raisons topographiques. La vendange 2013, si le soleil reste au firmament, les nappes hydriques étant pleines, s’annonce prometteuse. En septembre, au moment de la véraison, nous avons fait des vendanges vertes, pour concentrer la matière. L’équilibre acidité-alcoolémie est important».

Jean-Pierre agit ensuite comme un compositeur assemblant les notes noires puissantes d’un baryton et les notes blanches cristallines d’un soprano, pour mettre en musique ses cuvées. À la vendange 2012, les vins se sont ouverts trois semaines plus tard que d’habitude, en février et non en janvier. Il a accordé à ses bébés le temps de s’épanouir. «Je prends mon temps, c’est le vin qui parle. J’ai le champ libre parce que le Champagne Gosset a cinq années de stock en moyenne. Aucune cuvée n’est commercialisée à moins de trois ans de bouteille, cinq ans pour la Grande Réserve, et les millésimes se gardent dix ans. Il est même arrivé au Celebris 1988 d’être mis sur le marché dix ans plus tard tellement ce vin à la belle acidité était fermé. Le millésime 2004 a devancé en commercialisation le millésime 2002».


Jean-Pierre Mareigner présentant le nouveau millésime 2002
de la Cuvée Celebris de Gosset.

Cet homme de bon sens écoute la nature et jamais ne la bouscule. «À la vendange 2013, je fêterai mes 30 ans de maison. Dans la famille Gosset, je me sens bien, l’équilibre est harmonieux, la production sereine. On sait répondre à la demande de la clientèle. Elle réclamait un Blanc de Blancs sans année: il a été créé avec Jean-Pierre Cointreau, président, sans sacrifier au goût ancestral maison. La structure a été apportée par des raisins de la Montagne de Reims, issus de Villers-Marmerie et Trépail, qui ont été assemblés avec ceux de la Côte des Blancs. On ne se lasse pas de ce travail qui demande une remise en question annuelle à la vendange pour créer un millésime de rêve».
Son préféré? 1952. «J’en parle d’autant plus librement que je ne l’ai pas vinifié.C’est un souvenir vivant, j’ai encore en bouche la fraîcheur du Chardonnay, qui évoluait sur des saveurs beurrée et toastée, puis sur des arômes de citron confit, d’abricots».
Un vin qui est sorti 2e à la dégustation du millénaire 2000 organisée par Richard Juhlin. Un résultat heureux pour le Champagne Gosset, «un moment qui assurément avait un goût d’éternité» selon les mots du romancier Marc Lévy!

Marie-Caroline Bourrellis www.champagne-gosset.com

Maison LANSON
Jean-Paul Gandon cultive l’amour du métier
et crée de grandes cuvées

Fils de vigneron, né en Touraine, au pays de la douceur de vivre, comme Rabelais, ce bon vivant au ton rieur possède une solide culture sur toutes les composantes du métier.

Après des études de viticulture-œnologie en Bourgogne, il part sous les drapeaux en Algérie où il s’occupe de vignobles et de chais. À son retour, il met le cap sur la Champagne, est engagé comme simple vigneron à Avize par René Lallement, puis gravit les échelons, devient chef vigneron en 1972, responsable de la totalité du vignoble Lanson en 1982 et assume la responsabilité des caves en 1986. Il attire la sympathie et la confiance et Philippe Baijot, président du Champagne Lanson, lui accorde l’insigne honneur de créer les cuvées du deux- cent-cinquantenaire de la Maison, trois cuvées emblématiques magnifiant un style unique, baptisées Extra Age!
Entré dans la saga Lanson et ses changements de main, il est toujours resté fidèle au mot d’ordre de Victor Lanson «La Maison Lanson élabore ses vins dans le style originel établi depuis 1760». Pour perpétuer le goût Lanson, les cuvées ne subissent pas la fermentation malolactique car, explique-t-il, «l’acide malique est un support idéal pour les arômes de fruits frais». Les saveurs de pomme, poire, raisin sont une des 3 composantes du Black Label Brut. La seconde distinction est leur puissance, leur corps, leur générosité, apportées par une majorité de Pinot Noir dans la composition de la cuvée. La troisième est la fraîcheur et la longévité, qualités inhérentes à la non-fermentation malolactique.
Pour faire apprécier l’évolution des vins, cet homme exigeant et perfectionniste imprime la date de dégorgement sur toutes les cuvées Lanson. Le 1er âge (avant 3 ans), c’est le temps des fruits frais, des senteurs florales aussi; le 2e âge (de 3 à 5 ans) à maturité, révèle des saveurs de fruits mûrs et de pâtisseries chaudes; au 3e âge, à la plénitude, les vins développent des arômes tertiaires, des notes toastées. Sur ces cuvées matures, le dosage est homéopathique (3 g/l). Très pointilleux à toutes les étapes de la vinification, Jean-Paul Gandon nous fait remarquer qu’avec l’évolution climatique, les Champagnes ont perdu de leur vivacité, de leur tendu, et explique qu’il y a trente ans, le profil acide des vins se situait autour de 8-9 gr à la vendange, alors que dans les vingt dernières années, il était plutôt entre 7 et 8 gr/l. 2013, année continentale avec une vendange à fin septembre, nous ramènera peut être à ce qu’on a connu autrefois?

Jean-Paul Gandon, chef de cave de la Maison Lanson,
dirigeant une dégustation au siège.

Cet homme heureux, en 40 ans de métier, a toujours vu les vents souffler favorablement pour lui. Et au fil des ans il a développé un grand charisme, relevant avec éloquence ce qu’il a envie de faire passer. La verticale de millésimes allant de 1976 à 1997 qu’il a animée sous la tente à Vinexpo a laissé cois les éminents dégustateurs du Royaume-Uni comme d’Asie.
Il connaît tellement bien son sujet et les caractéristiques de l’année qu’il se permet de faire parler les vins: «1988 a encore beaucoup de choses à nous raconter et compte tenu de sa maturité, de sa structure et de son acidité, je choisirai un vieux Comté pour le déguster. Il présente des similitudes avec 2004, un vin tendu, tout en finesse aromatique. À sortir pour Noël cette année!». Le millésime 1976, le plus ancien de la collection dévoilée l’an dernier par la Maison, est, dixit son créateur, «à apprécier comme un vieil alcool au coin du feu».
Les grandes cuvées ne meurent jamais! Jean-Paul Gandon, bien que d’une grande humilité, peut se retourner avec fierté sur une carrière bien remplie qui lui a permis d’être dans le premier cercle des décideurs et de créer de grands vins!

Marie-Caroline Bourrellis www.lanson.com

MAISON MOËT & CHANDON
Benoît Gouez place l’innovation au cœur de l’élaboration

Natif de Saint-Lô, sous le signe du Capricorne, Benoît Gouez a grandi en Normandie et n’a découvert la vigne et le vin qu’à vingt ans, en suivant les cours de l’Ecole Nationale Supérieure d’Agronomie de Montpellier. Cette spécialisation associait sciences, techniques et sensibilité.

«Aujourd’hui quand on additionne la science et la technique en production, on fait bien; mais pour faire grand, il faut y ajouter une dose de sensibilité, pense-t-il. L’autre aspect qui m’a décidé à m’engager dans cette voie est la dimension culturelle, sociale et conviviale du vin. Le Champagne a une dimension de partage, est une forme d’art de vivre et fait voyager. Enfin la Maison Moët & Chandon m’a motivé, car cette locomotive de la Champagne a toujours une longueur d’avance sur la profession, bref est à la pointe du progrès».
«Dans la continuité de la collaboration entre Jean-Rémy Moët et le chercheur André Jullien à la fin du 18e siècle, Moët & Chandon est aujourd’hui la seule Maison à posséder une équipe de recherche et développement, confirme Benoît Gouez. J’aime comprendre. Le mot que j’utilise le plus est: pourquoi? Je respecte la tradition mais dois aussi rechercher la simplicité, l’épure dans l’élaboration, tout en conservant la générosité dans la production, d’où une exigence de précision.
Première étape de la vinification: la fermentation. Chez Moët & Chandon, son déroulement est suivi par des capteurs de dégagement de gaz carbonique et non plus par des traditionnelles prises de densité. D’une évaluation toutes les huit heures, nous sommes passés à une mesure toutes les cinq secondes. Cette réactivité nous permet d’être plus justes dans nos actions de pilotage que sont la régulation de la température, les apports d’oxygène et de nutriments pour les levures.
Plus j’en apprends, plus je progresse, plus je me pose des questions. La recherche et le développement ne sont pas mon cœur de métier, ils contribuent à notre quête permanente d’amélioration et d’excellence dans la qualité de nos vins.
Mes missions, avec le support de toute l’équipe œnologique, consistent à définir la qualité des raisins attendue, établir les filières d’élaboration adaptées, déguster l’ensemble des vins pour en apprécier le profil et le potentiel, assembler pour créer les cuvées, et effectuer le suivi en cave pour décider de la sortie des vins.
Je dois aussi perpétuer et faire évoluer le style du Moët Impérial. Ses trois principales caractéristiques sont: un fruité éclatant, reflet d’un beau terroir, produit d’une œnologie non oxydative avec des arômes d’agrumes, de pêche et fleurs blanches; une bouche savoureuse à la texture juteuse, généreuse, pulpeuse avec du charme, de l’élégance et de la rondeur; une maturité élégante obtenue par deux années passées dans la quiétude et la pénombre de nos vingt- huit kilomètres de cave. Tout commence à la vendange avec la définition de la maturité des raisins».
Paramètre subjectif, la maturité des raisins? «Chez Moët & Chandon, elle se mesure précisément. En pondérant la richesse en sucre et la taille des baies, on obtient la charge en sucre, et en traçant la courbe d’évolution du cycle du raisin au fil de jours, on est apte à saisir la manière dont la vigne nourrit le raisin, à appréhender l’arrêt de chargement qui correspond à la maturité physiologique et à décider du moment opportun de vendanger selon nos objectifs de profil des vins.
Le vin est vivant. Sa science demande d’être à son écoute et de lui appliquer la meilleure technique. On n’a pas de recette. Tous les ans, nous nous remettons en question et adaptons nos pratiques œnologiques. J’ai besoin d’informations pour prendre les bonnes décisions. Les outils servent d’indicateurs mais pour décider de la vendange, je vais dans la vigne et goûte les raisins. Idem pour l’assemblage du Moët Impérial et de ses 250 crus, je recompose la cuvée sur une dégustation à l’aveugle.


Benoît Gouez

Moët & Chandon a le plus grand vignoble de la Champagne (1.150 ha dont la moitié en Grand Cru et 25 % en 1er Cru). Au-delà de la quantité, la diversité est une richesse. Plus j’aurai de nuances dans les cépages, les villages, les années, pour composer l’assemblage, plus nombreuses seront les options, plus les vins seront précis et le style respecté. In fine c’est l’homme qui prend les décisions, et l’assemblage est lié à la dégustation pure.
Pour Moët Impérial, l’assemblage est toujours un mariage entre les trois cépages, à l’image du vignoble champenois. Je dispose de la plus large palette de raisins de la Champagne dont un négociant puisse rêver. Plus de 800 composants sont essentiels à la régularité de la gamme. Pour l’élaboration de Grand Vintage- traduisez des millésimes qui doivent être l’expression d’une année - je fais du sur-mesure, n’utilise jamais les même villages, mais toujours des vins matures au potentiel de vieillissement évident. J’ai la liberté de révéler leur caractère singulier».

Disciple de Richard Geoffroy, Benoît Gouez a un fort tempérament, est exigeant avec les siens - leadership de Moët & Chandon oblige - et se révèle un créatif qui garde, science à l’appui, le contrôle de ce qu’il produit. Il imprime sa création, et signe ses cuvées!

Marie-Caroline Bourrellis