
Longtemps relégué au rang de curiosité médiévale, l’hydromel retrouve aujourd’hui sa place à table, porté par une nouvelle génération d’artisans passionnés. Au Rucher de Saint Desle, près de Vesoul, Corinne et Christophe Duchanoy, anciens ingénieurs agroalimentaires et amateurs de gastronomie, relèvent avec brio le défi de redonner ses lettres de noblesse à cette boisson ancestrale.
Mentionné dans la mythologie scandinave comme breuvage des jeunes mariés — à l’origine de la fameuse lune de miel — l’hydromel est obtenu par fermentation d’un mélange d’eau et de miel (du grec hydro = eau, mel = miel). Selon les assemblages et les méthodes, il peut être sec ou liquoreux, tranquille ou effervescent, et se décline dans une vaste palette aromatique : fruits blancs ou exotiques, miel, fleurs, épices ou encore fines notes herbacées. Vinifié comme un vin de garde, il révèle toute sa complexité après deux années d’élevage, parfois davantage.

À la tête d’une centaine de ruches, le couple Duchanoy assure la maîtrise complète de la chaîne, du rucher à la mise en bouteille. « De mars à septembre, nous sommes au rucher et récoltons des miels de plaine (fruitiers, aubépine, acacia, fleurs d'été, tilleul...) et de montagne du Plateau des 1 000 Etangs dans les Vosges Saônoises. D’octobre à février, nous travaillons en cuverie avec nos fermenteurs (240 et 625 litres) et nos fûts bourguignons neufs. Nos miels ne sont ni chauffés ni filtrés afin de préserver leurs qualités gustatives. Les choix d’assemblage et les élevages longs en cuve ou sous bois créent une vraie diversité de millésimes ».
Leur gamme illustre la richesse de ce savoir-faire : quatre hydromels tranquilles (sec, demi-sec, moelleux et montagnarde), deux effervescents élaborés en méthode traditionnelle, deux eaux-de-vie issues de distillation, une liqueur et un vinaigre d’hydromel selon la méthode orléanaise.
Mais c’est surtout sur le terrain gastronomique que leur travail séduit. « Un hydromel sec accompagnera poissons délicats, volailles ou plats crémeux aux champignons. Le demi-sec se marie aussi bien au salé qu’au sucré : fromages, foie gras, cuisine épicée ou chocolat noir. Le moelleux se prête aux desserts aux noix ou aux bleus, tandis que les pétillants se savourent à l’apéritif ou sur un dessert festif. Quant aux eaux-de-vie, elles s’invitent dans un original ‘trou apicole’ avec un nougat glacé ! ». Autant d’accords qui révèlent la polyvalence de ce breuvage aux multiples visages.
Avec une production annuelle de 60 hectolitres et des collaborations régulières avec des chefs renommés, le Rucher de Saint Desle participe activement à la réhabilitation de l’hydromel comme boisson gastronomique à part entière. Du miel, de l’eau, de la passion et de la patience : telle est la devise du domaine, au service du goût et de la biodiversité.