Douze pays, vingt-quatre candidats, un finaliste venu de Malaisie et un succès japonais pour la troisième fois en quatre éditions de cette compétition, voilà quelques-uns des faits marquants d’une épreuve dont le niveau ne cesse de s’élever.
Kyoto qui fut pendant plus d’un millénaire la capitale impériale du Japon a assisté au sacre d’un jeune talent. Le 18 octobre dernier, c’est dans cette ville chargée d’histoire que Wataru Iwata a remporté la quatrième édition du concours A.S.I. du Meilleur Sommelier d’Asie-Océanie. Après Satoru Mori et Hiroshi Ishida, il est le troisième professionnel japonais à s’imposer dans cette épreuve. Un concours qui, pour la première fois depuis sa création, accueillait vingt-quatre candidats représentant douze pays, soit trois de plus qu’en 2015 à Hong Kong. Une augmentation significative qui souligne le développement de l’implantation de l’Association de la Sommellerie Internationale.
Certes, le niveau des compétiteurs est encore assez disparate comme les membres du comité technique ont pu le constater. Mais accepter de se mesurer à un tel concours peut permettre à de jeunes sommeliers de progresser d’autant plus vite qu’ils sont animés par une vraie passion. Ils ont pu comprendre, en particulier, combien l’accumulation d’un savoir livresque est essentielle pour franchir la première sélection.
Cette étape a permis de retenir les neuf meilleurs candidats qui ont affiché ensuite un niveau assez homogène. On trouvait alors un Australien (Mattia Antonio Cianca), un Chinois (Kam Fung Reeze Choi), une Indonésienne (Wicien Widjaja), deux Japonais (Taku Iguro et Wataru Iwata), un Malaisien (Justin Li Vern Ho), deux Néo-Zélandais (Andrea Martinisi et Marek Przyborek) et un Taïwanais (Hsin-Wei Ho).
Deux grandes thématiques avaient été choisies par le comité technique. La première était destinée à juger les qualités de chacun en matière de dégustation et d’accord mets-vins alors que la seconde était orientée sur le service et la commercialisation. C’est ce second atelier qui allait perturber le plus les candidats. Si, au demeurant, le service d’une bouteille de Sancerre blanc de Daniel Chotard du millésime 2015 ne présente aucune difficulté, le trouble est né de la mise à disposition des bouteilles. En fait trois flacons, tous issus du même domaine, étaient mis à la disposition des demi-finalistes : le Sancerre blanc 2015 commandé, un autre du millésime 2014 et enfin un Sancerre rouge. Trois bouteilles étaient en place sur un guéridon, trois autres dans une cave de service en fonctionnement et les trois dernières dans une cave de service à l’arrêt. Un seul des neuf sommeliers en compétition a choisi la bonne bouteille à la bonne température alors que les autres se trompaient sur le produit ou bien sur le lieu de stockage...
Le lendemain dans une ambiance sportive, les supporters japonais attendaient avec impatience la désignation des trois finalistes. Laquelle comblait leur espoirs avec la présence de l’un de leurs deux candidats. Wataru Iwata était accompagné par Kam Fung Reeze Choi, le candidat chinois de Hong Kong. Un match Japon-Chine, comme en 2015, arbitré par un invité surprise. Cette fois, il ne venait pas d’Australie mais de Malaisie. Et tout comme ses deux adversaires, Justin Li Vern Ho affichait un large sourire au moment de débuter les épreuves. Car après tirage au sort, il avait le privilège de plonger le premier dans les ateliers qui s’enchaînaient sous les yeux des huit cents spectateurs qui avaient pris place dans les salons de l’hôtel Okura.
Une épreuve de bar et de service, des dégustations associées à un test d’accord mets-vins, le décantage et le service d’un magnum à deux tables différentes, l’estimation de vins proposés à un collectionneur et l’identification de spiritueux constituaient la première phase de cette finale. Ensuite les candidats participaient ensemble à un quiz photographique avant d’assurer le spectacle avec le service d’un magnum de Champagne Piper-Heidsieck dans 17 verres.
La suite on la connaît... Au terme de tous ces ateliers, les trois finalistes, fidèles au sourire qui a illuminé leur visage tout au long du concours, ont attendu l’annonce du palmarès par Andrés Rosberg, le président de l’Association de la Sommellerie Internationale. Sa médaille d’or autour du cou, Wataru Iwata a été rejoint sur le podium par le chinois Kam Fung Reeze Choi qui montait sur la deuxième marche puis par Justin Li Vern Ho, le Malaisien classé troisième.
Un trio qui, avec passion, maîtrise et connaissances, a témoigné de la montée en puissance de la sommellerie asiatique. Laquelle n’est plus seulement dominée par le Japon. Un pays qui, grâce au succès de Wataru Iwata comptera deux candidats lors du concours A.S.I. du Meilleur Sommelier du Monde en mars 2019 à Anvers. Il accompagnera Satoru Mori, le représentant sélectionné par la Japan Sommelier Association.
Jean Bernard
Pourquoi avez-vous choisi de devenir sommelier et comment vous-êtes vous formé ?
Tout s’est passé dans un pays où la viticulture occupe une place importante. C’était en Nouvelle-Zélande, lorsque j’étudiais l’anglais. Le vin faisait alors partie de ma vie. Pour assurer ma formation, je ne suis pas allé dans une école spécialisée. J’ai étudié seul, pas seulement en lisant des livres traitant de vin, mais aussi en visitant des établissements vinicoles, puis en parlant avec les vignerons que je pouvais rencontrer.
Dans quel établissement travaillez-vous et le vin occupe-t-il une place importante ?
Je vis à Kyoto et je travaille dans un formidable bar à vins, Cave de K. Nous servons principalement des vins français et le goût de la clientèle locale est surtout orienté vers les vignobles classiques que sont la Bourgogne, Bordeaux et la Champagne. Nous accompagnons les vins proposés d’une cuisine assez simple.
Avec qui vous êtes-vous préparé pour le concours ?
Avec Hiroshi Ishida, vice-président de l’association des sommeliers du Japon, qui a remporté ce concours en 2015 et avec mon meilleur ami, Taku Iguro qui a atteint la demi-finale cette année. Je pense que je suivrai le même programme pour préparer le concours mondial. Mais je sais que ce sera beaucoup plus dur et intense.
Vous souriez tout le temps, même pendant la compétition. Doit-on comprendre que c’était facile pour vous ?
Non cela n’a pas été facile, bien au contraire même, c’était très difficile. Pourtant j’ai toujours essayé de sourire car c’est ainsi que je travaille au quotidien. Pour rester détendu, j’ai donc pensé qu’il ne fallait rien changer et que c’est en restant moi-même que je pourrais être le plus performant devant les juges ainsi que le public.
Quel est votre vin français favori ?
C’est toujours le Bordeaux !